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Chine: un génocide des Ouïghours en préparation?

Human Rights & Democracy a publié ce mois-ci un rapport qui décrit d’importantes préoccupations en matière de droits de l’homme concernant la Chine. Il déclare:

 « En 2017, il y avait de plus en plus de preuve que les droits civils et politiques étaient violés en Chine, et que l’espace de liberté pour la société civile était encore restreint. »

Le rapport décrit  qu’il y a de sévères restrictions à la liberté d’expression à travers la Chine, le droit à la liberté de religion subissant une pression particulière:

 « Il y a eu des rapports persistants sur la détention, le harcèlement et la persécution des groupes religieux ; chrétiens, musulmans, bouddhistes et pratiquants de Falun Gong et de la destruction des bâtiments religieux. « 

La persécution du peuple ouïghour dans la région nord-ouest du Xinjiang, la plus grande région de Chine au nord du Tibet est bordée par la Mongolie, la Russie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan, l’Afghanistan et l’Inde, inquiète de plus en plus.

La région a été incorporée dans la République populaire de Chine en 1949, mais elle a une identité et une culture distinctes. C’est la patrie du peuple ouïghour, qui est ethniquement turc et pratique l’islam, et qui le désigne comme le Turkestan oriental.

Il est également d’une importance stratégique immense pour la Chine, étant riche en ressources naturelles, comprenant l’uranium, le gaz naturel et le pétrole. Le Xinjiang donne accès à l’Asie centrale, une région que la Chine cherche de plus en plus d’influence sur la nouvelle route de la soie.

Le gouvernement chinois a encouragé les chinois Han à s’installer au Xinjiang, modifiant ainsi la composition ethnique de la région. En 1949, les chinois Han représentaient environ 6% de la population locale, alors qu’en 2011, ce pourcentage était passé à 38%.

Ils ont adopté des politiques de plus en plus restrictives envers les Ouïghours depuis les émeutes de 2009, où aux moins 200 personnes seraient morts. Beaucoup de ceux qui ont été tués étaient Han, et les tensions entre les populations ouïghours et Han restent élevées.

Comme le note le rapport du FCO sur les droits de l’homme et la démocratie:

« Au Xinjiang, les autorités ont introduit des mesures intrusives de sécurité et de surveillance ainsi que des restrictions culturelles visant la population musulmane Ouïghour. Des milliers d’Ouïghours ont été retenus dans des camps de rééducation après leur retour de l’étranger. « 

Ces techniques ne sont pas nouvelles pour Chen Quanguo, qui a été installé en tant que nouveau chef du Parti communiste au Xinjiang en 2016. Il avait auparavant supervisé un nouveau régime de sécurité répressif au Tibet. Chen Quanguo a apporté son approche intransigeante à la région, avec des augmentations massives des dépenses pour la police et le personnel de sécurité. Cela a eu pour conséquence une police profondément intrusive, utilisant à la fois la technique et plus d’effectif. Le Xinjiang est devenue le cauchemar des Ouïghours, un État policier raciste.

Visites imposées de fonctionnaires dans des foyers du Xinjiang

Depuis début 2018, les autorités chinoises imposent régulièrement des « séjours à domicile » aux familles musulmanes de la région du Xinjiang, a déclaré Human Rights Watch le 14 mai. Ces visites font partie de la campagne « Frapper fort » (« Strike Hard ») menée par le gouvernement d’une manière de plus en plus envahissante dans cette région, où habitent 11 millions d’Ouïghours et d’autres minorités musulmanes turques.

Au cours de ces visites, les familles sont obligées de fournir aux fonctionnaires des informations personnelles sur leur vie et leurs opinions politiques, et de participer à des activités d’endoctrinement politiques. Human Rights Watch a déclaré ;

 » Le gouvernement chinois devrait immédiatement mettre fin à ce programme qui viole les droits à la vie privée et à la vie familiale, ainsi que les droits culturels des minorités ethniques, afin de se conformer aux normes internationales relatives aux droits humains . »

Maya Wang, chercheuse senior sur la Chine à Human Rights Watch a déclaré ;

« Des familles musulmanes à travers la région du Xinjiang sont obligées de manger et de dormir littéralement sous l’œil attentif de l’État dans leurs propres domiciles. »

« Cette nouvelle campagne vient s’ajouter à toute une série d’autres mesures visant à exercer un contrôle soutenu et pervers de la vie quotidienne des habitants du Xinjiang. »

Depuis 2014, les autorités du Xinjiang ont employé 200 000 cadres d’agences gouvernementales, d’entreprises publiques et d’institutions publiques pour visiter et surveiller régulièrement les résidents. Les autorités affirment que cette initiative, connue sous le nom de «fanghuiju» (un acronyme qui signifie « visiter le peuple, profiter au peuple et rassembler les cœurs du peuple »)  est largement conçu pour « sauvegarder la stabilité sociale ».

En octobre 2016, les autorités ont lancé une campagne similaire, baptisée « devenir famille », qui s’est intensifiée ces derniers mois. En décembre 2017, les autorités du Xinjiang ont mobilisé plus d’un million de cadres pour passer une semaine dans des maisons d’habitants, en majorité musulmane, principalement dans les zones rurales.

Camps de rééducation

Le dernier développement qui peut-être le plus inquiétant, est l’internement des Ouïghours et d’autres minorités ethniques dans des «camps de rééducation». Les détenus sont soumis à un endoctrinement politique, et ceux qui ne s’y conforment pas risquent l’isolement, la privation de nourriture et d’eau ainsi que de punitions corporelles. Ces camps sont brièvement mentionnés dans le rapport du Foreign Office, mais il est suggéré que seuls les Ouïghours qui ont voyagé à l’étranger sont interné, ce qui est complément faux.

Le gouvernement chinois nie l’existence des camps, mais le Dr Adrian Zenz de l’école européenne de culture et de théologie en Allemagne a utilisé les propres dossiers du gouvernement pour démontrer que des installations ont été construites pour détenir des personnes à travers tout le Xinjiang. Selon certaines estimations, jusqu’à un million de personnes ont été détenues. Les enfants sont envoyés dans des orphelinats parce qu’il n’y a plus d’adultes pour s’occuper d’eux.

Thermo Fisher Scientific une société américaine a fourni du matériel de séquençage d’ADN à la police du Xinjiang. Selon le Dr Enver Tohti, ancien chirurgien du Xinjiang et chef de l’Association ouïgour en Angleterre, les autorités chinoises ont entamé en juin 2016 un projet d ‘«examen physique» dans le cadre duquel des tests sanguins à grande échelle de 15 à 20 millions Ouïghours vivant au Xinjiang.

Le Parti communiste chinois construit actuellement neuf crématoriums au Xinjiang. Le premier, près d’Urumqi, est devenu opérationnel. Et les Chinois n’embauchent pas deux ou trois gardes de sécurité, comme la plupart des crématoires le feraient. Ils embauchent 50.

 

Fatih Tufekci

Sources; Human Rights & Democracy, Human Rights Watch, Foreign Office,