Des associations britanniques ont condamné la décision de la France de dissoudre le groupe antiraciste Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF).
En annonçant cette décision mercredi, Gerald Darmanin, le ministre français de l’intérieur, a accusé le CCIF de mener depuis plusieurs années une « propagande islamiste », allégations que le groupe a fermement démenties.
Le groupe CAGE, basé à Londres, a répondu que cette décision » expose l’hypocrisie effrontée de l’État français qui prône la « liberté d’expression » tout en refusant légalement aux musulmans la liberté de s’exprimer et de s’organiser « .
CAGE est une organisation de défense qui fait campagne pour » des procès équitables, l’état de droit et la fin des injustices commises dans le cadre de la guerre contre le terrorisme « .
Selon le communiqué de CAGE, non seulement le CCIF est frappé d’interdiction, mais son personnel est « indéfiniment inscrit sur une liste noire », ce qui signifie qu’il ne peut pas créer de nouveaux groupes ni s’exprimer publiquement.
« Leur liberté d’association et d’expression a été suspendue pour une durée indéterminée », a déclaré CAGE, ajoutant que cette décision faisait suite à « une série de raids contre des mosquées, des écoles et des foyers islamiques ».
Mohamed Rabbani, directeur général de CAGE, a pour sa part déclaré : « Les personnes liées au CCIF ont été muselées d’une manière qui n’est pratiquée que dans les pays les plus autocratiques ».
Des lois spécifiques pour les musulmans
Et d’ajouter : « Ce bouleversement et cette tentative d’affaiblissement de la communauté musulmane font suite à l’annonce par Macron d’une nouvelle « loi sur le séparatisme » visant à réduire les activités caritatives et les initiatives politiques des musulmans ».
« Ils font également suite à une déclaration commune de l’UE sur un ‘front uni contre l’islamisme’, visant à détourner l’UE des violations françaises de la ‘liberté, de l’égalité et de la fraternité’ et même des lois européennes », a-t-il ajouté.
Il a déclaré que toute personne prônant le droit de s’organiser et de contribuer à un changement social positif « ne peut plus se taire ».
« Ce n’est pas ainsi que l’on peut nourrir la confiance entre les citoyens et le gouvernement. Nous devons parler avec courage pour ceux qui, en France, tiennent bon malgré la répression de l’État », a déclaré Rabbani.
L’Organisation arabe pour les droits de l’homme au Royaume-Uni (AOHR UK) a également condamné la décision du gouvernement français de lancer des opérations d’inspection dans les mosquées dans le cadre de sa « campagne contre le séparatisme ».
« L’AOHR UK a souligné que les politiques du gouvernement français envers les Arabes et les musulmans sont en phase avec les politiques prônées par l’extrême droite, qui appelle à la fermeture des mosquées et à l’imposition d’un contrôle strict sur les musulmans, ce qui alimente l’hostilité envers les musulmans et augmente les attaques contre eux », peut-on lire dans un communiqué publié jeudi.
Une campagne controversée
Les actions du gouvernement français contre les organisations musulmanes font suite à deux attaques brutales survenues ces derniers mois : la décapitation à Paris d’un enseignant qui avait montré à ses élèves des caricatures du prophète Mohamed et une attaque au couteau perpétrée dans une église de Nice, au cours de laquelle trois personnes ont perdu la vie.
Les représentants de la communauté musulmane de France ont condamné ces attaques terroristes, soulignant que les extrémistes détournent la religion de ses objectifs et que leurs actions ne peuvent être motivées par l’Islam.
Mais le président français Emmanuel Macron a promis une répression contre ce qu’il a appelé le « séparatisme islamiste » pour défendre les valeurs laïques de la France, et a déclaré que d’autres mesures seraient envisagées par le gouvernement.
La dissolution du CCIF s’inscrit dans le cadre de cette campagne et a été approuvée par le Conseil des ministres, qui a le pouvoir de dissoudre par décret tout organisme ou organisation à but non lucratif, sans examen judiciaire préalable.
Outre le CCIF, le gouvernement a également dissous, à la fin du mois d’octobre, BarakaCity, une ONG humanitaire musulmane.
Ce groupe était accusé d’avoir des liens avec des groupes radicaux, une accusation qu’il a fermement démentie