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Agression raciste sur Adil Sefrioui : la police aurait elle falsifié le Procès Verbal ?

Sefrioui Adil Bicot

Après l’agression d’Adil Sefrioui le mois dernier, le journal Libération révèle que « l’insulte «bicot» audible dans un document vidéo n’apparaît pas dans les PV des policiers ». De plus, toujours selon la Libération, l’avocat de la défense a été dessaisi du dossier sans raison et le procès prévu ce vendredi est finalement remis à plus tard.

S’il n’y avait pas de précédent, nous aurions pu croire à une maladresse policière, or tout tend à croire que la police suit un mode opératoire de manière systémique dans les affaires de racisme.

Contacté par Medya Turk Info, Adil Sefrioui nous révèle que depuis le début de cette affaire, la police doloise se comporte de manière douteuse. Ainsi la victime aurait le sentiment que la police a cherché à le pousser à la faute, notamment en lui révélant l’adresse de l’agresseur au moment de signer son dépôt de plainte, une révélation qui serait un « geste » envers le plaignant.

Conscient de la manœuvre, Adil Sefrioui n’a pas prêté attention à cette information et déclare qu’un acte de vengeance ne lui a jamais effleuré l’esprit, préférant s’en remettre à la justice à laquelle il a entière confiance.

Adil Sefrioui, la victime de l’agression, en compagnie de sa femme Laetitia (Claire Jachymiak/Hans Lucas pour Libération)

Cet épisode aurait pu passer inaperçu si par la suite, comme révélé dans Le Monde, M. Sefrioui nous confirme avoir été convoqué (par téléphone) au commissariat en vue d’un rappel à la loi pour « violences légères ». De quelles violences s’agit il ? Et depuis quand la police convoque-t-elle par voie téléphonique et non postale de manière officielle ?

Mais les irrégularités ne s’arrêtent pas là, en effet sur le Procès Verbal censé être celui de M. Sefrioui, les insultes racistes ont purement et simplement disparu, laissant croire à une falsification grossière. Si tel est le cas, la falsification d’un document officiel, et par un représentant de l’autorité de surcroît, est un délit grave puni par la loi.

Exténué par le comportement policier et le manque de soutien des autorités publiques, à commencer par le Maire de sa ville, M. Sefrioui nous confie, non sans amertume, ne plus se sentir en sécurité et songe sérieusement à quitter la France pour demander asile en Finlande où réside sa sœur. Sa seule consolation reste la confiance en son avocat, Maître Randall Schwerdorffer, ses amis et les associations anti racistes qui se tiennent à ses côtés.

Rappels des faits précédents

Tout ceci nous rappelle de façon troublante d’autres affaires où la police s’est comporté de façon similaire, notamment dans l’affaire de Viry-Châtillon révélée dans un documentaire sulfureux de Médiapart. En effet dans cette affaire, des pans entiers de PV ont disparus ayant conduit des innocents à passer des années en prison. Toujours dans cette même affaire, malgré les preuves évidentes de l’innocence des prévenus, l’IGPN (police des polices) aura fermé les yeux.

Dans d’autres affaires, comme celle de Michel Zecler, la violence gratuite de certains policiers ont pu être filmés, et comme dans l’affaire Sefrioui, la question est de savoir si sans ces images accablantes où en serait la justice ? Puisque la parole des agents dépositaires prévaut à celle des simples citoyens.

Pourquoi les réactions des pouvoirs publics restent timides ?

Dans toutes ces affaires, le Président de la République et ses Ministres successifs en charge ont toujours une réaction mesurée, contrairement aux affaires à caractères antisémites par exemple. Vu de l’étranger, le gouvernement est accusé de suivre une politique raciste et islamophobe institutionnalisée, chose contre laquelle elle se défend avec véhémence.

En effet le président Macron, pourtant très critique envers la chaîne d’information Al Jazeera, la convoquera pour se livrer à un exercice de dédiabolisation durant près d’une heure pour donner suite à un appel au boycott des produits français. C’est pourquoi toutes ces affaires, qui se ressemblent et se cumulent, mettent à mal l’image de la France.

Par ailleurs la France redoute plus que tout, une vague de contestation fleuve à l’américaine suite aux nombreuses bavures dont celle de Georges Floyd.

Une autre dimension à prendre en considération pour mieux comprendre, est sans conteste le feuilleton des Gilets Jaunes. Dépassé par les événements et l’incapacité du gouvernement à les contenter, ce dernier sera pris « en otage » par sa police à laquelle il donnera carte blanche pour en finir avec les manifestations.

Durant cette vague de contestation, la police aura recours à une répression disproportionnée sans antécédent. Cette prise en otage sera définitivement confirmée par le limogeage de l’ancien Ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, qui pourtant avait une position très dure pour le mouvement les Gilets jaunes.

En effet le discours de M. Castaner tenu en juin 2020 contre le racisme et la violence policière, n’a pas été du goût de tout le monde. Pourtant dans ce discours, où il est fait allusion à Georges Floyd, le Ministre ne fit que rappeler que la France n’est pas les États Unis et que le racisme n’a pas sa place dans la Police.

Enfin s’il fallait commencer depuis le début, il faudrait rappeler l’épisode Alexandre Bennalla, chargé de mission et proche de Macron, en train de violenter un couple lors d’une manifestation, et ce en toute illégalité avec brassard de Police.

Toutes ces affaires sont symptomatiques d’une dérive autoritaire sous le regard d’une Police attentive à chaque fait et déclaration de la classe politique auxquelles nous pourrions ajouter les tribunes fracassantes d’une partie du corps de l’Armée.