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La France tente, sans succès, de se redorer l’image à l’étranger

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Mercredi 11 novembre, le compte twitter de la Représentation française à l’ONU a publié un tweet à l’occasion de la journée de la science qui a provoqué une vague d’indignation auprès des internautes, critiquant « la tentative de la France de redorer son image à l’étranger après les accusations d’Islamophobie« .

Jamais un tweet n’avait suscité autant d’irritation chez des Français et ainsi, devant les critiques incessantes, la représentation française a dû se résigner et a supprimé son tweet moins de 24 heures après l’avoir publié.

En effet, lors de la journée de la science le 11 novembre, le compte officiel « La France à l’ONU » a publié un tweet pour appeler à la solidarité mondiale avec une photo d’une scientifique voilée.

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C’est cette utilisation de la photo d’une femme voilée qui a mis le feu aux poudres. Philippe Marlière, professeur au Collège de London a rappelé que « la politique anti-hijab de la France est jugée discriminatoire & attentatoire aux droits humains à l’étranger. Voici pourquoi sur cette photo destinée à l’ONU apparaît une chercheuse portant un hijab. Cette photo cynique montre que la France a conscience de sa mauvaise réputation ».

Tentative de redorer l’image suite aux appels de boycotts ?

En effet, plusieurs internautes ont dénoncé l’hypocrisie des autorités françaises en rappelant que le voile faisait régulièrement polémique en France.

« Lallab », une association féministe musulmane est aussi montée au créneau sur son compte twitter en jugeant le choix de la photo de « déplacé ».

« Aujourd’hui plus que jamais, il faut rappeler que les femmes musulmanes n’ont jamais été respectées par les pouvoirs politiques et médiatiques. Celles qui portent un foulard n’ont cessé d’être représentées comme des femmes soumises, exclues du marché de l’emploi et des études. »

De son côté, Marwan Mohammed, ancien directeur du CCIF (Collectif Contre l’Islamophobie en France), association menacée de dissolution par le ministre de l’Intérieur, a rappelé « qu’en France, on ne supporte même pas qu’une femme portant un foulard donne des conseils de cuisine. Mais à l’international vous utilisez le portrait de cette dame pour redorer une image déplorable, alors qu’en vérité vous ne l’accepteriez même pas en stage dans votre délégation. »

En réalité ce qui frappe le plus les internautes c’est ce double discours du gouvernement français. En effet, les internautes ont rappelé qu’à plusieurs reprises le président Français Emmanuel Macron et ses ministres ont déclaré à diverses occasions que « le voile n’était pas compatible avec les valeurs de la République ».

Sur les chaines de télévisions françaises, plusieurs chroniqueurs ont stigmatisé et stigmatisent les femmes musulmanes portant le voile en les assimilant à des terroristes. Par exemple, la journaliste Judith Waintraub, avait partagé la photo d’Imane, une étudiante voilée qui donnait des conseils de cuisine pour les étudiants précaires, dans une vidéo diffusée sur BFMTV, avec la note « 11 Septembre ». Devant l’avalanche de critiques, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait pris la défense de la journaliste.

Accompagnement scolaire interdit

Par ailleurs, d’autres internautes ont souligné que la France interdit aux mères voilées d’accompagner leurs enfants dans les sorties scolaires. Le ministre de l’Education, Jean-Michel Blanquer, avait aussi pris position contre le voile en affirmant que ce dernier « n’était pas souhaitable dans notre société ».

D’ailleurs, cette obsession française pour le voile suscite souvent l’indignation dans les autres pays européens. A plusieurs reprises, des médias étrangers, notamment les Anglo-saxons ont tenté de comprendre « le rejet des femmes voilées en France ». Récemment encore, Myriam Poutoux membre du syndicat étudiant, avait subi un vrai lynchage médiatique lorsqu’elle avait voulu témoigner avec son voile du « calvaire des étudiants pendant la crise sanitaire ».

De même, comme le révélait l’Agence Anadolu, 4 enfants de 10 ans s’étaient retrouvés en garde à vue pendant 11 heures suite au signalement de leur professeur qui les accusait « d’apologie du terrorisme ».

Le gouvernement envoie ses ministres à l’étranger

Il faut dire que depuis la republication des caricatures par Charlie Hebdo puis les événements qui ont succédé jusqu’à l’assassinat de Samuel Paty, la France semble avoir pris une position hostile aux musulmans. Même si les membres du gouvernement et Macron en tête s’en défendent, le monde musulman ne paraît pas convaincu. En effet, plusieurs manifestations appelant au boycott des produits français ont lieu dans plusieurs pays du monde.

Face à l’ampleur de la contestation, Macron a envoyé son chef de la diplomatie, Jean-Yves Le Drian, chez son allié Al-Sissi en Egypte, afin de trouver un soutien auprès de la prestigieuse université Al-Azhar. Malgré des positions parfois très critiquées sur certains sujets liés à l’Islam, l’Imam de cette université a signifié sa « fin de non-recevoir » au ministre français. Il a rappelé que « l’insulte du prophète est la ligne rouge à ne pas franchir pour les musulmans ».

De même, le ministre de l’intérieur français, Gérald Darmanin, qui se dit choqué de voir « des rayons halals dans les supermarchés en France » a tenté de convaincre les pays du Maghreb, affirmant que « le combat de la France était contre le terrorisme ». Une fois de plus, le ministre a essuyé des milliers de critiques avec le rappel de ses prises de positions polémiques antérieures.

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Pour le moment, seuls l’Arabie Saoudite et les EAU semblent comprendre la France dans « sa lutte contre le terrorisme », tandis que de plus en plus de voix en France relèvent une défiance à l’égard des musulmans.

La suppression du tweet

Il faut reconnaître que le tweet de « la France à l’ONU » n’a pas seulement dérangé les défenseurs des droits humains mais aussi une grande partie des identitaires qui ont accusé le gouvernement « de partager la vision des islamistes ».

Cet état d’esprit illustre parfaitement le double langage du gouvernement français coincé entre « sa nouvelle base électorale » et les contraintes économiques qui poussent la France à tempérer son langage.

Le problème, c’est que les responsables de la communication du président Macron semblent croire dans un monde aussi « digitalisé », qu’ils peuvent continuer à avoir un discours « guerrier à l’intérieur » et « un discours humaniste à l’extérieur ».

Face à des protestations d’une telle ampleur, le compte « France à l’ONU » a décidé de supprimer le tweet en question.

Fatih KARAKAYA

Rédaction avec Agence Anadolu