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Aydin Tuncay dit le « guerrier » champion d’Europe de boxe thaï

Dans notre épopée des parcours atypiques des franco-turcs, nous avons eu l’honneur de nous entretenir avec Aydin Tuncay, champion d’Europe de WBC (Wold Boxing Council).

Aydin est un jeune homme originaire d’Oyonnax dans le département de l’Ain, baigné dès son jeune âge dans un environnement sportif, entouré d’un père lutteur et boxeur, d’un grand frère adepte de karaté. Vers l’âge de 13 ans il s’essaye au karaté et au football, se rendant compte que le karaté n’est pas sa tasse de thé et qu’il n’a aucun atome crochu avec le ballon rond, il commence à fréquenter le boxing club de sa ville, et s’y sent dans son élément. Il prend conscience que la boxe est sa vocation.

  • Pourquoi avoir choisi la discipline du Muay Thaï et non la boxe française ou anglaise ?

Je n’ai pas eu à choisir, c’était la discipline au boxing club d’Oyonnax, que j’ai commencé à fréquenter à 13 ans et je me suis senti dans mon élément. Par contre j’ai fait mon premier combat sur le ring qu’à l’âge de 15 ans.

  •  Pour devenir un champion, combien cela nécessite-t-il d’heures d’entrainement hebdomadaire ?

Comme j’ai grandi dans la cité, la bagarre je l’ai dans mes tripes donc je ne me force pas vraiment pour l’entraînement mais lorsque je dois disputer des grands championnats, je travaille ma technique environ 6 heures par jour un mois avant le combat.

  • Une hygiène de vie vous est-elle imposée ?

Non, mais il faut une alimentation équilibrée, un bon sommeil et beaucoup de repos. Il faut éviter les excès surtout juste avant le combat puisque nous avons un poids corporel à respecter.

  •  Avez-vous une idole dans votre discipline que vous prenez en exemple?

Je n’ai jamais eu une quelconque idolâtrie pour un boxeur spécialement mais j’ai beaucoup d’admiration pour des  boxeurs comme  Farid Villaume ou Buakaw Banchamek.

  • La boxe thaï est un sport violent, des coups sont portés à la tête, n’est-ce pas dangereux? Ne craignez-vous pas les conséquences à long terme?

Non, je n’y pense pas, car de toute façon dans tout métier il y a une part de danger, chacun de nos corps réagit différemment, par exemple Mohammed-Ali a été atteint de Parkinson mais Myke Tyson est en pleine forme. Je forme un tout avec la boxe et n’imagine pas une vie sans.

  •  Votre famille vient-elle vous soutenir lors de vos combats? Quelle est la réaction  de votre maman lorsque vous montez sur le ring?

(Rire)

Ma mère m’aidait à me bander les mains dans ma jeunesse et s’en tenait qu’ à cela et évite encore aujourd’hui de suivre un combat car cela la stresse et elle ne se sent pas bien. Mes oncles me disent que je devrais arrêter de combattre maintenant mais le comble c’est que certains de mes petits cousins se lancent dans la boxe thaï et personne ne leur déconseille. (Rire)

  • Y a-t-il d’autres boxeurs professionnels franco-turcs?

Bien sûr, nous avons 2 autres compatriotes , Yetkin Ozkul qui est champion du monde poids plume, surnommé la « dynamite turque » et Yuksel Ayaydin de Lyon qui est champion d’Europe de boxe thaï catégorie poids lourd.

  •  A quoi devez-vous votre surnom de “guerrier”?

Dans notre discipline, je suis connu pour ne pas avoir froid aux yeux et surtout pour être coriace et tenace. Tout le monde sait que tant que je ne serais pas KO je n’abandonnerai pas. Nous, les turcs, nous avons tous un guerrier qui sommeille en nous.

  • Vous êtes un sportif professionnel, votre discipline vous permet-elle de gagner de grosses sommes comme les footballeurs?

(Rire)

Non malheureusement,  je suis obligé de travailler à côté. Ce qui est dommage dans notre communauté est que j’essaie de représenter mon drapeau au mieux de mes capacités, j’ai remporté 49 victoires, je pourrais faire mieux si je pouvais me concentrer exclusivement sur ma discipline, si des hommes d’affaire franco-turcs me sponsorisaient. Il faut savoir que si je suis blessé lors d’un combat, pendant des mois je ne peux monter sur un ring donc si je ne travaille pas et que je ne suis pas sponsorisé, je ne peux pas subvenir à mes besoins. Nous manquons de soutien au sein de notre communauté.

  • Dans quel domaine travaillez-vous en dehors de votre discipline?

Dans beaucoup de domaines (rire), la nuit, je travaille comme agent de sécurité au casino de Cannes, la journée, je suis menuisier et entraîneur de boxe thaï donc imaginez les exploits que je pourrais accomplir avec cette énergie si je ne me consacrais qu’à la boxe!

L’année dernière , j’ai aussi ouvert  la TMTA(Tuncay Muay Thaï Academy), une salle d’entraînement  dans la zone des Tourrades à Cannes-Mandelieu pour transmettre mon amour et mon savoir-faire de la Muay Thaï. Actuellement, j’entraîne une dizaine de sportifs.

  • Au vu de la violence grandissante dans les cités, ne pensez-vous pas que le Muay Thaï peut devenir une arme fatale hors des rings?

Non, les combats peuvent paraître violents, mais à la base nous apprenons à nous maîtriser, à gérer nos émotions et à garder notre sang-froid. Nous apprenons le respect de l’Autre. Lorsque je suis confronté à la violence dans la rue, j’essaie de gérer la situation très calmement. Beaucoup de personnes de mon entourage me font la remarque, du fait que je suis agent de sécurité au Casino, qu’ils sont étonnés, me connaissant sur le ring, de constater mon calme et ma maîtrise lors de situations tendues.

  • Avez-vous un dernier message à faire passer à la communauté franco-turque?

Oui, comme je vous l’ai déjà dit, nous avons besoin de soutien, de sponsoring afin de pouvoir nous consacrer entièrement à notre discipline. Moi, je donne le maximum de moi-même  pour représenter mes 2 pays, mais personne pour m’aider à aller plus loin autre que mes propres moyens.

Nous remercions Aydin pour sa cordialité et lui souhaitons bonne continuation. Le “guerrier” ne déroge pas à l’adage “fort comme un turc”.